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Le Colonel Raymond Donau,
Un infatigable découvreur du Sud tunisien.



Raymond, Victor, Joseph Donau[1]est né à Givet le 2 juillet 1862. Il est le 6e enfant de Félix Donau et de son épouse Adèle Mesmin. Il fréquente l'école de Givet, puis le collège de Namur où son frère Victor avait déjà fait ses humanités. Givet était alors sous blocus prussien. Il prépare ensuite son entrée à l'Ecole Spéciale Militaire de Saint-Cyr où il rentre en 1883. Après deux années d'étude, il reçoit sa première affectation comme sous-lieutenant au 110e Régiment d'Infanterie de Dunkerque. En 1889, il entre au service des Renseignements en Tunisie.

Commence alors pour lui une longue carrière dans ce pays où il restera pratiquement tout le temps, sauf deux interruptions dont une durant la grande guerre. Nommé au poste d'Aïn Draham, il apprend les premiers éléments de la langue arabe et s'intéresse aux populations locales. En 1890, il est affecté comme adjoint du Commandant Rebillet au poste de Médenine où un cercle vient d'être créé. Nommé officier de renseignements en 1891, il est envoyé à Foum Tataouine où il s'occupe activement de toutes les nombreuses questions intéressant ce territoire : surveillance de la frontière, établissement de relations suivies avec les tribus dont il apprendra à leur contact la mentalité et les mœurs. En 1895, il est réintégré au 41e régiment d'infanterie à Mayenne où il sera promu capitaine. Le bled doit lui manquer, car il demande sa réaffectation en Afrique. Il est versé en 1899 au 3e Bataillon d'Afrique au Kef, puis au service des Renseignements du cercle de Kebili, comme commandant supérieur. Il est chargé de la surveillance de la justice indigène, de la mise en valeur des terres du Bled Segui et du Chareb, de l'exploration du Sud tunisien en collaboration avec le bureau d'El Oued et de l'organisation des contingents méharistes. Parfaitement intégré, Raymond Donau deviendra un "Africain" dans le sens le plus noble. A Kebili, il avait trouvé un cercle tout organisé avec des adjoints dévoués et compétents, ce qui lui permet sans inconvénient pour le fonctionnement des Affaires Indigènes, de multiplier ses tournées et d'entreprendre des recherches archéologiques.


Fig. 1 Le commandant Donau au poste de Déhibat en 1910. (3e. personnage à gauche en vareuse sombre. Document aimablement communiqué par M. Th. Donneaux )
Camp de Dehibat 1911. Le commandant Donau, 3e personnage à gauche en vareuse sombre.


Curieux de nature, il prend une part très active dans des recherches originales qui deviendront pour lui une seconde passion. Homme de terrain, il n'hésitera pas à parcourir à cheval tout le Sud tunisien à la recherche de ces vestiges merveilleux laissés par la civilisation romaine. Le Nefzaoua, où il y fait des découvertes importantes, offre de ce point de vue des possibilités inespérées. Il se crée aussi les occasions pour parcourir les contrées voisines de Gabès, Gafsa, Tozeur ou Sfax dans lesquelles il entretient des relations de bon voisinage avec les autorités civiles et les populations indigènes. Lors de ses permissions, il aime parcourir à cheval les anciennes voies romaines.

Il note méthodiquement sur son carnet les vestiges rencontrés, relève les épigraphies et dresse les croquis de situation. Ces informations seront reprises par ses officiers topographes et reportées sur leurs minutes de carte. On doit ainsi à Donau la plupart de nos connaissances sur les voies romaines de Tacape - Turris Tamalleni, de Capsa – Tacape et de Capsa - Turris Tamalleni, ou sur les installations militaires du limes Tripolitanus. Il est le découvreur des premières bornes cadastrales de la grande centuriation de Tunisie et à ce titre, il en est l’inventeur. Ces découvertes seront publiées par l’intermédiaire de J. Toutain qui s’en était assuré la primauté :
     Les nouveaux milliaires de la route de Capsa à Tacape découverts par M. le capitaine Donau. (Toutain, Bull. et Mém. de la SNAF, t.4. 1903),
     Occupation romaine du Sud tunisien. (Toutain, Bull. Archéo 1903),
     Les nouveaux milliaires de la route de Capsa à Tacape
(Toutain, Bull. de la SNAF 1905),
     Le cadastre de l'Afrique romaine
(Toutain, Mém. de la SNAF 1905 et Mém. de l'AI & BL 1907),
     Nouvelles découvertes sur la voie de Turris- Tamalleni
(Toutain, Bull. Archéo 1906).
     Donau publiera dans le bulletin archéologique du Comité deux études : Note sur la voie romaine de Turris Tamalleni à Capsa (1904), Castellum de Guedat Cedar (1904).


Nid de milliaires (M. 153) de la voie d’Asprenas signalé par le Capitaine Donau dans lequel se trouve la borne cadastrale (B.6b).
Nid de milliaires (M. 153) de la voie d’Asprenas signalé par le Capitaine Donau
dans lequel se trouve la borne cadastrale (B.6b).


En 1906, le siège du commandement est transféré à Médenine. Le capitaine Donau y prend ses nouvelles fonctions et obtient le grade de chef de bataillon (juin 1907). Il poursuit ses recherches archéologiques avec la collaboration des officiers des Affaires Indigènes. Elu correspond de la Société des Antiquaires en 1905, il publiera ces travaux :
   - Etude sur la voie romaine de Tacape à Turris Tamalleni (Soc. Archéo de Sousse, 1907),
   - Recherches archéologiques dans le Sud tunisien en 1907- 1908 (Bull. Archéo, 1909),
   - Nouveaux documents sur la voie de Capsa à Turris Tamalleni (Bull. Archéo 1909),
   - La voie romaine de Théveste à Thelepte (Bull. de la SNAF, 1908),
   - Notes archéologiques sur la frontière Tuniso-Tripolitaine avec Pervinquière
(Bull. Géo 1912),
   - Les Nybgenoi de Ptolémée (AI & BL, 1909) avec Cagnat,
   - Les Inscriptions latines nouvellement découvertes (Si Aoun)
(AI & BL, 1909) avec Merlin.

En décembre 1909, Donau est en tournée dans la vallée de l'Oued Déhibat à la frontière tripolitaine alors sous contrôle ottoman. Il est assailli par le feu des réguliers turcs. Afin d’éviter de nouveaux incidents de frontière, une commission mixte est créée pour délimiter cette frontière. Il sera nommé à la tête de la commission française et supervisera les opérations de bornage qui se termineront par la pose de la dernière borne frontière (n° 233) au sud de Ghadamès en février 1911. Ce tracé est toujours en vigueur entre les états tunisien et libyen. Il a été retrouvé dans les archives de la famille Donau, une lettre adressée à son frère Victor dans laquelle il décrit ces bornes (voir fac-similé).

Ensuite, il sera réintégré dans son arme, le 148e d'Infanterie. Il poursuivra au cours de ses tournées dans les postes ses recherches archéologiques qu’il fera connaître dans le Bulletin Archéologique :
   - Deux nouvelles inscriptions romaines du Sud tunisien (Bull. Archéo, 1914),
   - Sépultures berbères de Tunisie (Bull. Archéo, 1915).

A la déclaration de la grande guerre en 1914, il est nommé Lieutenant Colonel, remis à la disposition du 8e Régiment de Tirailleurs lequel est affecté aux opérations de guerre. Il se distingue notablement à Verdun et reçoit la Légion d'honneur avec Croix de Guerre et palme en avril 1915. Il sera cité deux autres fois et décoré de la cravate Ste Anne de Russie en août 1916. Mis hors cadres et nommé Commandant militaire du Sud tunisien à Médenine en 1918, il remplace pour la 3e fois le colonel Foucher à ce poste. Il est démobilisé l'année suivante à 57 ans avec le grade de Colonel. Il se retirera à Bougara où il poursuivra ses recherches et publiera ses derniers travaux :
   - Fouilles de Rémada en 1914 (note au Bull. Archéo, 1919)[2],
   - Autour de Gigthis (Bull. Archéo, 1920),
   - Le fortin de Bézeréos (sous la plume de Merlin, AI & BL, 1921),
   - Inscriptions néo-puniques au sud de Mareth (Bull. Archéo, 1921).

Raymond Donau est décédé le 4 août 1930 à Givet où il est inhumé dans le caveau familial du cimetière du Petit-Givet. Le plus bel hommage lui sera rendu par le capitaine Chavanne en 1931 dans son Historique des Affaires Indigènes en Tunisie.


Fac-similé de la lettre de Donau à son frère lors des opérations de bornage à la frontière tuniso-tripolitaine en 1911.
Fac-similé de la lettre de Donau à son frère lors des opérations de bornage
à la frontière tuniso-tripolitaine en 1911.


Edition du 8 janvier 2005 


 

1 Nous remercions particulièrement le Général M. Berlaud du Service Historique de l'armée de Terre d'avoir bien voulu nous communiquer les états de service du Colonel R. Donau, ainsi que M. Thierry Donneaux de Givet qui a si aimablement effectué des recherches sur la famille Donau dans les Archives départementales des Ardennes. Qu'ils trouvent ici l'expression de nos plus vifs remerciements.

2 Ces travaux ont été repris par M. Euzennat et P. Trousset et publiés dans : Le camp de Remada, fouilles inédites du Commandant Donau (mars-avril 1914), Africa, 1978.