Centuriations et orientation solaire.
Les bornes gromatiques de Tunisie.
par L. R. Decramer*, R. Hilton**,
A. Plas***
Résumé.
De nombreuses bornes gromatiques, ces archives incomparables
laissées en place par les géomètres romains, ont été retrouvées
dans le Sud tunisien. Ces repères géodésiques permettent de reconstituer
l'ossature de la carte, la forma de Africa Nova, que
la 3e légion Auguste était chargée de dresser. Il est
alors possible de déterminer la méthode de triangulation utilisée.
Celle-ci est basée sur la diagonale (hypotenusa) d'un triangle
rectangle de côtés 5 et 7, les méthodes modernes de triangulation
ayant simplement repris ce principe pour le généraliser aux triangles
quelconques. On peut donc, en n'importe quel point du territoire
à lever, caler l'instrument de visée (la groma) sur la méridienne
locale et viser selon l'angle d'orientation choisie pour cette centuriation,
à savoir ici 35,5°. Après une étude de l'orientation de nombreux
cadastres, un principe général d'orientation solaire des limitatii
est proposé. Son application à l'étude des cadastres eux-mêmes,
aux cadastres et aux structures superposés est ensuite examiné.
La corrélation entre centuriation et voies structurantes majeures
est mise en évidence avec la via Asprenas, cette première
voie stratégique construite aussi par la 3e légion Auguste.
Il semble alors possible, à défaut de datation précise de cette
centuriation, de dresser une chronologie relative de ces réalisations.
Mots-clés : Rome, Tunisie, centuriation, cadastre, arpentage,
géodésie, orientation solaire, voie romaine.
Centuriations
and Orientation with Respect to the Sun.
The
Gromatic Stones of Tunisia
Abstract
Numerous gromatic stones, incomparable archives
left in position by the ancient Roman surveyors, have been found
in Southern Tunisia. From these geodesic reference points, it is
possible to reconstruct the main lines of the map, the forma
of Africa Nova, that the 3rd Augusta legion was responsible
for drawing up and thus discover the method of triangulation they
used. It is based on the hypotenuse of a right-angled triangle of
sides 5 and 7 units, which modern triangulation methods have since
generalized so that any triangles can be used. At any given point
of the territory to be surveyed, the sighting instrument (the groma)
can be set on the local meridian and sightings made at the angle
of orientation chosen for the centuriation, here 35.5°. After studying
the orientation of many cadastres, we propose a general principle
of orientation with respect to the sun for the limitatii.
The application of this principle to the study of the cadastres
themselves and to the structures superimposed on them is then examined.
The correlation between the centuriation and the main structural
roads is demonstrated with the via Asprenas, the first strategic
road built by the 3rd Augusta legion. It then
appears to be possible, given the lack of a precise date for this
centuriation, to draw up the relative chronological sequence of
these achievements.
Key words: Rome,
Tunisia, centuriation, cadastre, geodesy, solar orientation, Roman
road.
Cette communication a été préparée pour la journée d'étude et de
recherche "La mesure des longues distances dans le cadre des
limitations antiques", organisée par le CNRS, UMR 154 archéologie
et histoire, à Lattes le 28 septembre 2001.
Toulouse le 15 mai 2001
Edition du 13 mars 2002
Un vaste réseau centurié couvrant la majeure
partie du Centre et du Sud de la Tunisie, réalisé par la 3e
légion Auguste probablement sous Auguste et poursuivi jusqu'à Trajan,
c'est à dire s'étendant sur près d'un siècle, avait été révélé à
partir de bornes gromatiques trouvées par des officiers topographes
autour des grands chotts. Ces bornes de centuriation portent, inscrites
dans la pierre, leurs coordonnées par rapport aux deux axes fondamentaux
du cadastre, ainsi qu'un décussis, ces repères que le géomètre utilisait
pour ses opérations.
A ce jour, trente quatre de ces bornes cadastrales ont été retrouvées,
pour la plupart à l'emplacement défini par le géomètre. Ce sont
donc des témoins géographiques uniques, mais aussi des documents
épigraphiques remarquables par leur nombre et par leur variété.
Ces éléments archéologiques devraient pouvoir nous aider à mieux
comprendre les principes et les méthodes d'arpentage chez les Romains.
On doit au capitaine Donau
[1] , le commandant du cercle de Kebili et à ses officiers
topographes qui étaient chargés de dresser la carte de ce territoire,
la découverte des premières bornes autour du chott el Fejej (fig.
1). Toutain [2]
, qui rapportait ces découvertes en 1905, était arrivé,
à la suite d'une interprétation erronée des textes gromatiques,
à une conclusion surprenante : l'origine de ce cadastre se trouvait,
selon lui, en plein désert saharien. Il rejetait ainsi la
seule borne trouvée près de Graïba et placée sinistra decumanus
qui lui permettait de corriger ses erreurs. Il s'engageait alors
dans une polémique stérile avec Barthel et Davin [3] .
Barthel [4] , au contraire, constatant
que celle-ci se trouvait sur le même cardo (uk 265) qu'une
autre borne (B.10) située dextra decumanus (dd 80), arrivait
à une conclusion toute différente. Son locus gromae se situait
non loin de Thala, à environ 18 kilomètres au nord-est d'Ammaedara,
le camp d'hiver de ces centurions géomètres. Il levait ainsi l'ambiguïté
de Toutain en orientant le kardo maximus à 37° E-N-E. Son
œuvre est remarquable, tant du point de vue géographique et gromatique
que du point de vue historique. Cependant, sa construction géométrique
souffrait d'une localisation approximative des dix huit bornes alors
connues, dont les distances avaient été mesurées "au pas du
cheval du capitaine Donau".
Aussi Davin [5]
, un ingénieur géographe, s'est attaché à déterminer
de façon précise cinq bornes au moyen d'un théodolite. Il estimait
que le locus gromae se situait, non plus en plaine, mais
au sommet d'une montagne, le Bou el Hanèche, non loin de l'origine
présumée de Barthel avec un orientement de l'axe majeur à l'E-N-E
de 39,02 gr (35,1°) et une valeur de la centurie comprise entre
703 et 710 m. Ces résultats étaient pratiquement confirmés quelques
années plus tard par Legendre [6] qui, à partir du
mémoire Davin, avait refait les calculs. Il tentait aussi de trouver
une raison astronomique (solaire ou lunaire) à cette orientation,
mais sans pouvoir conclure. Il constatait simplement qu'il n'y avait
rien de particulier sur le sommet du Bou el Hanèche, sinon un marabout.
Des doutes sur une origine située au sommet d'une montagne étaient
à nouveau émis par Chevallier
[7] qui remarquait que le cadastre d'Ammaedara
a une orientation de 25,2° au N-E et celui de Sufetula de
32°, donc différents de la centuriation. Trousset
[8] , dans sa synthèse des travaux précédents, pensait
que l'origine devait se situer en terrain plat et il adoptait une
"déviation légère" dans l'orientation de Davin et une
"valeur plus élevée" de la centurie en prenant 710 m.
Il estimait enfin que "les mensores ont tiré droit vers
le fond de la petite Syrte et que cette orientation, a une signification
militaire et politique et non une signification astronomique".
Nous verrons qu'il ne s'agit pas ici de telles approximations, mais
bien d'opérations rigoureuses et mathématiques, de levés géodésiques.
Les travaux de Davin, bien que plus précis que ceux de Barthel,
s'appuyaient sur un nombre limité de bornes dont certaines n'étaient
plus en place. Ses calculs étaient donc entachées d'incertitudes
non négligeables. Pour reconstituer avec plus de précision le carroyage
romain, il fallait donc augmenter l'échantillonnage, mais il fallait
aussi se baser sur une référence géographique plus fidèle qu'un
support de carte à moyenne échelle.
Contrairement aux cadastres dont le carroyage est mis
en évidence à partir de vestiges d'alignements récurrents et orthogonaux
remarqués sur une carte, une spatio-carte ou une photo aérienne,
puis reconnus sur le terrain
[9] . Ici, la centuriation est définie à partir des témoins
mêmes mis en place par le mensor. Ce carroyage est, par principe,
une grille géométrique aux nœuds de laquelle se trouvent ces bornes.
Il est donc possible de bâtir un modèle mathématique, c'est à dire
un outil prédictif qui permet de localiser une borne à partir de
ses coordonnées romaines, et inversement de reconstituer ses coordonnées
à partir de sa position mesurée. A partir des coordonnées géographiques
(relevées sur le terrain) et romaines (gravées dans la pierre),
on recherche par un modèle mathématique
[10] la meilleure superposition entre les deux réseaux.
Le modèle est bâti sur deux orthodromies selon le decumanus et
le kardo. On calcule alors les coordonnées géographiques
théoriques en fonction des coordonnées romaines pour un jeu de 4
inconnues (latitude et longitude du point de départ, angle α,
centurie), qu'on compare aux valeurs mesurées sur le terrain, et
on réitère jusqu'à minimiser l'écart moyen. En outre, on dispose
maintenant de techniques faciles à mettre en œuvre pour localiser
géographiquement avec précision un élément, c'est le GPS [11] .
Initialement, compte tenu des nombreuses incertitudes
liées aux premières bornes signalées : positions géographiques approximatives,
comme par exemple "à 2 km de la montagne", épigraphies
incertaines ou parfois détruites, les premiers calculs étaient assez
approximatifs. Mais une fois les premières bornes reconnues, le
modèle est réajusté et devient de plus en plus précis. C'est ainsi
qu'après quatre campagnes de prospection, une trentaine de bornes
ont été trouvées dont une dizaine d'inédites.
Une fois arrivés sur la borne grâce au modèle prédictif,
celle-ci est stationnée au GPS et ses coordonnées enregistrées dans
le datum WGS 84
[12] . L'épigraphie est lue et parfois estampée. Dans
certains cas, un "tour d'horizon" à la planchette topographique
complète les levés. Afin d'améliorer la précision, une mesure très
précise de la distance et de l'azimut entre les bornes B.19 et B.23
a été exécutée avec une station totale Sokkia. Enfin, toutes les
bornes précédemment visitées ont été à nouveau stationnées au GPS,
après la libération de la Selective Availability, afin de bénéficier
de la nouvelle précision.
forma entre le locus gromae et la zone centuriée. Mais
les rapports étroits qui existent entre cette centuriation et la
via Asprenas (fig. 2) qui commence au camp d'hiver de la
3e légion à Ammaedara permettent cependant d'estimer
le cheminement suivi par ces centurions géomètres. De même, aucune
borne gromatique n'a été signalée citra kardinem, ce qui
tenterait à montrer que les objectifs militaires et d'aménagement
du territoire s'orientaient exclusivement vers le sud-est de l'Africa
Nova.
On peut répartir ces bornes en 4 catégories :
1° Les bornes avec une inscription du géomètre permettant de dater
l'opération d'arpentage (B.1, B.7, B.12, B.14, B.15, B.21 [14] , B.24, B.26),
les unes ayant été placées par C. Vibius Marsus (Tibère, 29 ap.
J.-C.), les autres sous Nerva Trajan (~100 ap. J.-C.). La borne
B.24, plus septentrionale et en principe antérieure, possède 12
lignes de texte pour le moment indéchiffrables.
2° Les bornes quintarii (chaque 5e limite)
dont le uk est multiple de 5 et le dd pouvant être multiple
de 5 ou de 7 (B.9, B.10, B.17 B.18, B.19, B.20, B.22, B.27, B.30
(fig. 4). Par exemple pour la B.19 [15] : DD LXXXIV ;
VK CCXL et pour la B.20 : DD LXXXX (I)
[16] ; VK CCXXXV.
3° Les bornes de 2e ordre ou subsécives qui portent
le signe > (centurie ou limes) ou ц (B.4, B.5, B.6,
B.23, B.25, B.28).
4) Les bornes an épigraphiques qui sont reconnaissables par un
décussis sur la tranche supérieure ou un cadre sur la face avant
(B.2, B.8, B.13 ?, B.29, B.31).
Enfin certaines bornes qui ne sont pas encore confirmées comme
gromatiques :
-
la borne N, un milliaire de la voie Aquae Tacapitanae
–Turris Tamalleni qui porte un decussis et qui serait
aussi quintarius (fig. 5),
-
la borne de Terhendourt (CIL 38 et 11051, B.?) portant l'inscription
des Nybgenii qui serait, selon Barthel et nous-même, au nœud
dd 65 et uk 350 (fig. 5),
-
la borne de Trajan (CIL 22787, B.3) sur laquelle le géomètre
dit "qu'il n'a pu atteindre le sommet de la montagne",
mais qui n'a pas encore été retrouvée.
-
la B.16, borne an épigraphique du khanguet el Asker – qui
n'a pas été retrouvée malgré d'intensives recherches -, que Barthel
avait rangée dans la liste par "pure supposition".
Toutes ces bornes sont parallélépipédiques (fig. 2), taillées dans
un calcaire dur à petits fossiles, de couleur ocre clair pour la
plupart, et phonolithe
[17] pour les pierres du Bled Segui. Certaines sont
massives (~260 kg) de dimensions moyennes : 120* 39* 31 cm (B.6),
d'autres bien taillées sont de dimensions plus réduites : 80* 38*26
(B.20), enfin certaines sont brisées (B. 30). La borne 26 est particulière
(fig. 6) : elle est composée de 3 blocs superposables dont deux
portent la dédicace du géomètre à l'empereur Nerva Trajan et les
noms des territoires délimités par cette ligne décumane : les Nybgenii
et les Tacapitani. Sur le troisième bloc, un decussis est
gravé avec ses cupules (fig. 11). Leur emplacement est reporté sur
la carte (fig. 7) ainsi que le carroyage en soulignant le decumanus
65 qui sert de frontière de part et d'autre du chott el Fejej.
A partir de toutes ces mesures, on peut reconstituer
le réseau. Paramètres du carroyage calculés :
Origine (locus gromae) : latitude N 39,6716 gr
N 35° 42,224'
borne (0,0) longitude E 7,0961 gr (méridien Paris)
E 8° 43,254' (WGS 84)
Centurie : c (20 actus) = 704,6 m (1 pes = 0,2936m)
Orientation : α = 35,5°/ est (azimut du K.M. Co-α =
54,5°).
Discussion.
Il se situe dans la plaine du Saltus Massipianus, au nord
de Thala (fig.1). Cette plaine est la zone plate la plus proche
rencontrée par une équipe de géomètres stationnant à Ammaedara
et opérant sur la Table de Jugurtha. Des recherches antérieures [18] , nous ont conduit à prospecter cette étendue
couverte de ruines romaines, dont la butte de Sidi ben Kraled et
le domaine du Saltus. Nous n'avons pas trouvé deux voies
à angle droit de 40 pieds et de 20 pieds de large qui, selon les
gromatici [19]
, marquaient le decumanus maximus et le kardo
maximus. Par contre, on a noté la présence de l'ancienne voie
romaine Cirta Regia (Sicca Veneria)- Thala- Capsa qui longe le Saltus
Massipianus. Elle est ici rectiligne, strictement orientée nord-sud
et suffisamment plane pour permettre un arpentage régulier et conséquent [20] .
On trouve une valeur moyennée sur toutes les bornes de 704 m (1
pes = 0,293 m, 1 actus = 35,2 m). Par contre, on a
noté des valeurs locales plus élevées dans le Bled Segui, environ
710 m. Dans le Chareb, où se trouvent de nombreux témoins, la centurie
est de 704 m. Cette dispersion donne une idée de la précision et
de la régularité des levés des arpenteurs. Il serait donc illusoire
de vouloir dater les cadastres selon la grandeur du pied, comme
cela a été proposé
[21] .
L'angle de 35,5° ramené à l'origine est très proche de l'orientation
trouvée par Davin et Legendre. Il est calculé selon une orthodromie,
c'est à dire qu'il peut être localement différent compte tenu de
la convergence des méridiens. Cette orientation laisse à penser
que des observations astronomiques auraient été conduites sur la
Table de Jugurtha [22] (fig. 1). Cette
montagne tabulaire est un site historique important
[23] , un signal géodésique de premier ordre [24] . Elle domine
le camp de base des géomètres à Ammaedara. En effet, une
voie romaine orientée dans cette direction a été relevée près du
marabout de Sidi Abdel Jaouadi [25] . Les traces des deux voies orthogonales
sont reportées fidèlement sur la carte du capitaine Désiré (carte
au 1/ 50.000 de Kalaat es Senam). Elles pourraient être les vestiges
du kardo maximus et du decumanus maximus, au point
où sont consultés les auspices. Un chaînage conséquent est possible
sur ce plateau de 80 ha pour le raccordement avec la base du Saltus
Massipianus, par visées optiques uniquement (cultelatio).
Par analogie aux méthodes modernes, ce marabout serait le datum
des mensores, ce point astronomique initial qui permet
aux géodésiens d'orienter leur réseau de triangulation. Ce point
fondamental est toujours un lieu élevé et symbolique, en l'occurrence
la croix du Panthéon en France, la cathédrale Saint-Louis sur la
colline de Byrsa à Carthage pour la Tunisie (fig. 1). Ce point astronomique,
ce datum est généralement différent de la "base".
Cette ligne, choisie en terrain plat et dégagé, est arpentée avec
une grande minutie pour atteindre la précision requise pour calculer
les distances. C'est pourquoi, le locus gromae ou plus précisément
l'origine du réseau arpenté (borne 0,0) qui se situe dans la plaine
du Saltus Massipianus (fig. 1), est différent du datum.
De la même façon, le choix de cet angle d'orientation (a=35,5°)
pourrait être en relation avec le lever du soleil au solstice d'été.
De plus, cet orientement se trouve à partir de cet observatoire
dans la direction générale de Carthage
[26] .
On doit remarquer que toutes les bornes de premier
ordre (fig. 3) sont disposées selon un uk croissant multiple de
5, elles sont quintarii. Par contre selon le cardo, elles
sont multiples de 5 ou de 7.
Plusieurs bornes ont été retrouvées dans le Bled Segui, dont certaines
inédites. Elles sont présentées dans le plan de la forma (fig.
8). Trois bornes quintarii (B.24, B.20, B.19) trouvées
autour de Bir Oum Ali se situent sur un même parallèle (à 0,8° près).
Bornes
|
24
|
20
|
19
|
N (WGS) °
|
34° 09,213’
|
34° 09,286’
|
34° 09,329’
|
Y (UTM) m
|
37.791.90
|
37.793.30
|
37.794.30
|
dd
|
98
|
91
|
84
|
uk
|
230
|
235
|
240
|
Bornes de Bir Oum Ali
: latitudes et coordonnées romaines.
Elles sont disposées selon un d uk = 5 centuries (100
actus) et un d dd = 7 centuries avec un ratio [27] duk /ddd
= 5/7 soit un angle de 35,5° (exactement arctg 5/7 = 35,538°). Cet
orientement vers l'est - à mieux que 0,1' sur près de 12 km – ne
semble pas fortuit. L'orientation solaire de cette centuriation
est indubitable.
Etude de l'orientement des bornes B.19 et B.23.
Ces deux bornes du Bled Segui sont en place. Leur distance
et leur azimut ont été mesurés précisément au théodolite et ces
valeurs confirmées par les relevés au GPS. Une analyse détaillée
avait conduit aux résultats suivants
[28] , dans lesquels on compare l'azimut mesuré B.19-B.23
(109,52° +- 0,1°) à l'azimut théorique dans le carroyage romain
(fig. 8), et ceci pour les grilles concurrentes possibles, à savoir
:
·
la grille losangique méridienne 7/10 d'azimut 55,008°,
·
la grille losangique parallèle 5/7 d'azimut 54,462°,
·
la grille orthogonale carrée classique de côtés 5*5
et d'azimut 54,736° (arctg √2/2).
·
La grille orthogonale rectangulaire de même azimut
(arctg√2/2).
Azimut (Az)
B19-B23
|
Grille losangique méridienne
(m, n) 7/10
|
Grille losangique parallèle
(p, q) 5/7
|
Grille orthogon. classique
(5*5)
|
Grille orthogo. rectangulaire
(√150* √75)
|
Orientation du cadastre Co-α
|
55, 008°
|
54,462°
|
54,736°
|
54,736°
|
Azimut théorique Az /NGR (°)
|
110,016°
|
109,470°
|
107,866°
|
107, 587°
|
Ecart : Δ (Az mesuré - Az/NGR)
|
-0,496°
|
+0,05°
|
+1,654°
|
+1,933°
|
Valeur de la centurie c. (m)
|
698 +/-3‰
|
698 +/-3‰
|
710 +/-3‰
|
707 +/-3‰
|
Conclusion
|
Possible
|
Acceptable
|
Non acceptable
|
Non acceptable
|
Tableau comparatif selon
les différentes hypothèses de construction du carroyage
De la même façon, on calcule la valeur de la centurie à partir
de la mesure de la distance inter borne.
Discussion :
Au vu de ces résultats, la centurie reste toujours dans les variations
généralement admises (700 -710m). Elle n'est pas un critère de choix.
Par contre l'azimut diffère notablement d'une hypothèse à l'autre.
La construction du carroyage selon les grilles losangiques, c'est
à dire sur les diagonales d'un rectangle 5*7 et 7*10 restent les
seules possibles et le rectangle de base 5*7 offre de meilleurs
résultats [29] .
- Grille losangique 5/7
La méthode de construction d'une réseau centurié par la diagonale
est maintenant bien connue sur le terrain [30] et par les textes
gromatiques [31] . Les gromatici ont construit
ici un rectangle 5*7 en suivant la diagonale orientée à l'est. Il
est donc possible de répéter à l'infini sur le terrain ce rectangle
par un contrôle de cette diagonale toujours orientée est-ouest.
La figure engendrée est une grille losangique (p, q) de demi-angle
au sommet 35,538° (ratio 5/7) (fig. 8). Cette valeur est très proche
de l'orientation moyenne calculée pour la centuriation (35,5°).
Cependant cette mesure précise dans le Bled Segui est unique, elle
mérite d'être confirmée sur d'autres sites.
Au nord du Chott el Fejej, un nombre appréciable de bornes gromatiques
ont été trouvées, dont certaines inédites. Elles sont portées figure
9 dans les coordonnées UTM 32, ainsi que le carroyage romain. Un
quintarius de 100*100 actus : B.1 (70 ; 280), B.26 (65 ;
280) et B.27 (65 ; 275) est mis ainsi en évidence, en rappelant
que les bornes B.26 et B.27 placées sous Trajan sont plus tardives
que la borne B.1 de Vibius Marsus. On remarquera aussi des sub-divisions
(striga) rectangulaire 2*3 ou carrée 3*3 centuries. On notera
surtout la série de bornes placées sur le décumanus 65, qui servira
de frontière entre les Nybgenii et les Tacapitani.
6-2-1 La décumane de pierre.
A partir de bornes signalées par Donau (B.7, CIL VIII,
22787 et CIL 22788) et par Chevarrier (CIL VIII, 38 et complément
11051) sur lesquelles Nybg(enii) était inscrit, Toutain [32] et Barthel [33] avaient reconnu des bornes de délimitation entre
les Nybgenii et les Tacapitani. Barthel avait remarqué
en particulier que les deux bornes trouvées à l'est d'Henchir Chenah
(CIL 22788 et 22787) devaient se situer non loin du point dd 65
uk 280 de la centuriation, et que la pierre trouvée près du sommet
du jebel Terhendourt, prendrait les valeurs dd 65 uk 350.
6-2-2 orientement de la frontière.
Six bornes du limes 65 ont été retrouvées [34] , auxquelles on peut rajouter la borne de Terhendourt.
Elles sont répertoriées en annexe 1 et présentées sur la figure
9. Cette décumane bornée sur près de 250 kilomètres serait donc
le plus long limes connu à ce jour [35] . Cette ligne servait de frontière depuis la barrière
de montagnes du jebel Hadifa qui sépare la plaine du Segui (territoire
des Capsenses) du bassin du chott el Fejej (fig. 2) jusqu'aux monts
de Matmata. Les bornes placées sous Trajan pour marquer cette frontière
s'appuient manifestement sur le carroyage tracé ici par le proconsul
Vibius Marsus.
Son gisement local a été mesuré à partir des bornes en place, il
est de 35,9° (fig. 9). A la convergence des méridien près, il est
égal à l'orientation calculée (35,5°). Cet angle de 35,9° diffère
notablement des 35,0° donné par le ratio 7/10. Il n'y a donc plus
ambiguïté. La grille 5/7 est la seule acceptable. Elle semble aussi
plus conforme avec la répartition des termini qui sont espacés
généralement de 5 en 5 centuries selon le decumanus maximus.
En conclusion, la centuriation tunisienne serait construite sur
un rectangle 5*7, c'est à dire selon une orientation solaire d'azimut
54,462°. C'est pourquoi, on examinera comment les finitores
pouvaient conserver cette orientation sur de très longues distances
et ceci en terrain montueux.
La question de l'orientation astronomique des cadastres
ne devrait même pas se poser. Le cadastre est un cadre géographique
basé sur les axes cardinaux de la Terre. Hygin Gromatique recommandait
de "tenir compte du ciel" et fustigeait ceux qui ont renoncés.
Il préconisait "de saisir l'ombre à la sixième heure".
Cette méthode est valable toute l'année et à toute les latitudes,
elle est relativement précise. Cependant la durée de la mesure peut
entraîner une légère déviation sur la prise du méridien local [36] . On retiendra
les ordres de grandeurs suivants pour quelques pays :
Pays
|
Tunisie (centre)
|
Italie
(centre)
|
Narbonnaise
|
Germanie(cen.)
|
Bretagne (nord)
|
Latitude (°)
|
35°
|
40°
|
43°
|
50°
|
55°
|
Δα0 (')
|
4,87'
|
5,21'
|
5,46'
|
6,21'
|
6,96'
|
Condition d'observation D = +/- 2h aux équinoxes.
Δα0 = écart angulaire entre le méridien vrai et le méridien
mesuré par cette méthode.
La méridienne locale une fois déterminée au gnomon,
le géomètre oriente son premier limes par la méthode pro
hypotenusa selon l'azimut du cadastre, c'est à dire selon le
ratio choisi, par exemple 5/7. M. Guy [37] a montré dans son étude comparative
sur plusieurs dizaines de cadastres qu'une forte récurrence apparaissait
dans ces orientations pour les fractions en cinquièmes (quintarius),
tels que : 1/10,1/5, 3/10 etc, ce que confirme la centuriation tunisienne.
Illustration : figure des orientations
En poursuivant cette analyse par la méthode de la tangente et en l'appliquant
à toutes les fractions simples en cinquièmes, on arrive aux résultats
suivants :
Pics de récurrence en fonction du ratio (selon réf. M.Guy).
Discussion
A noter que la centuriation tunisienne tombe dans un cas singulier,
où deux angles d'orientations sont très proches : 34,992° et 35,538°
pour un angle mesuré de 35,5°. Dans l'histogramme, les pics de récurrence
correspondent parfaitement aux ratios, même si certains ratios semblent
peu fréquents : 5/9, 4/5, 5/5. Nous verrons que le ratio 5/9 correspond
au cadastre de la Colonia Iuniona de Carthage, que le ratio
4/5 correspond à la centuriation Centre-Est de Tunisie, enfin le
ratio 5/5 (1) au principe de diagonalisation. Selon les résultats
de cette synthèse, il serait donc possible de ramener les azimuts
de tous ces cadastres à une fraction de 5. Cependant cette orientation
ne nous permet pas de distinguer entre les deux axes majeurs lequel
est le kardo et lequel est le decumanus.
Hygin le Gromatique, par ses critiques, nous éclaire sur ce qui
n'est pas la règle, mais l'exception : "Beaucoup, ignorant
le système du monde, se sont laissés guider par le soleil, c'est
à dire par son lever et son coucher, bien qu'il ne puisse être saisi
par l'instrument en fer en une seule fois. Quoi donc ? La groma
mise en station après la prise des auspices, éventuellement en présence
du fondateur, ils ont observé le lever au plus près et ils ont mené
dans les deux parties des limites avec lesquels le kardo
n'a pas coïncidé à la sixième heure. Certains pour ne pas tracer
des limites coordonnés à ceux des colonies voisines, renonçant
à tenir compte du ciel, ont établi un (système) de mesure par lequel
se maintiendraient seulement la superficie des centuries et la longueur
des limites. Certains se sont basés sur la longueur du territoire
et ils ont tracé le decumanus là où elle était la plus longue.
Certains ont tout retourné, ils ont tracé le decumanus vers
le midi et le kardo vers l'orient ; ainsi dans l'Ager
Campanus qui est autour de Capoue."
Hygin fustigeait donc ceux qui ont ignoré les repères astronomiques
ou se sont basés seulement sur le lever et le coucher du soleil
(voir supra). De même, pour les cadastres voisins il recommande
de se guider sur les axes astronomiques et non pas sur les limites
déjà définies (voir infra, cadastres superposés). Le decumanus
n'est pas dirigé nécessairement selon la plus grande étendue du
territoire et les axes principaux ne sont pas confondus obligatoirement
avec les axes cardinaux. Hygin nous apprend par ce qu'il ne nous
dit pas, qu'il existe une règle, une méthode qui doit être générale
[38] .
Que nous apprend la grande centuriation ? Ici, les axes fondamentaux
sont clairement identifiés par leur orientation et leur direction.
Le cardo est construit selon un ratio 5/7 par rapport au levant
(linea orientalis), la valeur 5 (quintarius) étant
prise selon le decumanus (angle α = 35,54°). Le cardo
est orienté E-N-E et le decumanus S-S-E, ce dernier se trouvant
dans la direction générale du territoire à cadastrer. On pourrait
donc énoncer un principe général [39] .
Tous les cadastres sont en rapport avec le soleil. Ils sont orientés
par référence aux axes cardinaux. L'angle d'azimut serait choisi
selon une fraction simple de cinq. Parmi ces ratios, la diagonale
construite sur un quintarius du decumanus maximus
serait orientée vers l'orient
[40] .
Ce principe d'orientation pourrait être illustré par
la miniature d'Arcerianus (La. 189, 8-15, fig. 164 et Th.
103-103a) où figure un cadran solaire. Dans le diagramme attenant,
on a bien un découpage en 5 sur le décumanus et en 10 sur le cardo.
Il suffit de choisir dans le diagramme le ratio voulu pour avoir
directement l'orientation désirée.
Après consultation des auspices, le lieu où est planté "l'instrument
de fer" pour la prise de l'orientation solaire, pourrait être
le marabout Sidi Abdel Jaouadi sur la Table de Jugurtha. Depuis
ce point, le kardo maximus est dans la direction générale
du soleil levant au solstice d'été, c'est à dire globalement vers
Carthage, le ratio choisi pour son orientement est de 5/7 (α
= 35,538°/ Est). Le triangle rectangle de côtés 7 selon le kardo
et 5 selon le decumanus a sa diagonale orientée vers l'orient.
Le locus gromae, ce lieu où démarre l'arpentage se situe
dans la plaine du Saltus Massipianus. Cette base (en terrain
plat) pourrait être l'ancienne voie nord-sud reliant Cirta (Sicca
Veneria) à Thala. On remarquera que le decumanus maximus
est construit selon la plus grande étendue de la limitatio
(fig. 1).
Cette centuriation est un cas d'école [41] exemplaire particulièrement
étudié. La Colonia Iunonia est orientée à 29,3° E-N-E. Cette
direction correspond approximativement au solstice d'été. Les auteurs [42] ont donc cru
que "les decumani ont été tracés vers le lever du soleil
au solstice d'été". Or, nous avons montré
[43] que le lever du soleil au solstice au moment de
sa création était de 30,4°. Ce n'est donc pas l'angle du cadastre.
Selon le principe énoncé, son orientation correspond plutôt au ratio
5/9 (29,05° pour 29,3° mesuré).
Dans ce cas, le kardo maximus est orienté E-N-E (α
= 29,05°) [44] . Le decumanus
maximus et le kardo maximus auraient pour origine le sommet
de la colline de Byrsa (cathédrale Saint-Louis). Depuis ce sommet,
cette direction se trouve globalement dans la direction du soleil
levant au solstice d'été. En effet, ce jour-là le soleil se lève
au-dessus de la mer, près de la pointe du cap Carthage à Sidi Bou
Saïd, il aurait pu donc servir d'élément déterminant dans le choix
du ratio 5/9. La ligne de base pourrait être, selon la suggestion
de Schulten [45] , la voie qui
conduit à la Résidence de France à la Marsa. Elle se trouve en terrain
suffisamment plat pour arpenter une base (fig. 10). Il n'y a aucune
raison d'exécuter un long, difficile et incertain travail de nivellement
entre le sommet de Byrsa et la plaine [46] , il suffit de ramener la mesure
linéaire en terrain plat par planimétrie (cultelatio ?).
Le kardo serait ici la ligne la plus étendue de la limitatio.
La Carthage romaine a un carroyage urbain différent, orienté à
~30,3°/N [47] . Son ratio serait donc de 5/3 (orientation exacte
α = 59,04°/ Est selon le principe proposé). Comme pour la Colonia
Iuniona, son locus gromae aurait pour origine la colline
de Byrsa [48] . Le kardo maximum est
orienté N-N-E à 30,96° (à comparer aux 30,3° mesurés). Ce cadastre
est bien orienté par rapport au soleil et non sur le littoral [49] , même si celui-ci a pu servir
d'indicateur général, c'est à dire le besoin pragmatique pour le
géomètre à se conformer aux exigences du relief. Les deux cadastres
de Carthage sont bien calés sur les axes astronomiques à partir
d'un même datum, ils sont superposés, mais différents (fig.
10).
De nombreux réseaux centuriés s'enchevêtrent parfois sur un même
territoire (Falerne, Romagne en Italie, Narbonnaise, Béziers, Orange
en France, centuriations en Tunisie, etc.). De la même façon, une
structure, un réseau routier, vient parfois s'intégrer dans le cadastre
local. On a donc tenté naturellement de rechercher comment ses réseaux
s'articulent entre eux et lequel servait de support à l'autre (antériorité).
Schulten cite l'exemple suivant : "Si on voulait diviser un
terrain parcouru par une des grandes routes (via), on appuyait
la centuriation sur cette voie, dont, dans ce cas, une partie jouait
le rôle de decumanus maximus". Cet exemple est évidemment
possible pour un petit lotissement [50] qui s'appuierait sur une voie structurante, mais
elle ne pourrait pas s'appliquer à une centuriation d'envergure
si le finitor n'a pas une référence absolue pour recaler
sa groma.
Les grandes voies structurantes rentrent souvent dans un rapport
simple avec le cadastre attenant [51] . Il est donc possible de traiter
ces exemples par la géométrie. Dans la composition de deux systèmes
orientés, on retiendra que les angles s'additionnent algébriquement,
tandis que les ratios se composent selon la loi des tangentes :
tg (a+b) = (tg a + tg b) / (1 – tg a*tg b)
tg (a-b) = (tg a – tg b) / (1 + tg a*tg b) où tg a et tg b sont des ratios
simples.
En général, l'addition de deux angles ne donne pas un ratio final
simple [52] .
Exemple : supposons un réseau orienté à 11,3° (1/5) et une voie
construite selon ce réseau dans le rapport ¼ (14,0°). On obtient
: tg (a+b) = (1/5 + ¼) / (1 – 1/5*1/4) = 9/19
→ arctg 9/19 = 25,3°, qui est bien l'addition algébrique
des 2 angles :11,3° + 14,0°.
Ce rapport 9/19 n'est pas simple. L'exemple choisi par M. Guy
[53] est un cas particulier : 1/5 et 2/3 se combinent
pour donner 1 (45°).
Cas de la via Domitia et des cadastres de la
Narbonnaise [54]
.
Cette voie Domitia est orientée dans le secteur de Lapalme à ~
-12° (N-N-O) [55]
. Elle rentre en relation avec le cadastre Narbonne B
dans le rapport 2/3 (tg 33,7° = 2/3). Ce cadastre est orienté à
~ 21° (N-N-E). Selon le principe d'orientation des cadastres énoncé,
Narbonne B serait exactement à 21,8° (2/5, ratio le plus proche
correspondant à l'azimut mesuré).
Or, la loi d'addition des angles ou de la combinaison des ratios
conduit pour la via Domitia à une orientation de : 21,8°
- 33,7° = - 11,9°, qui est équivalent à :
tg (a-b) = (2/5 - 2/3) / (1 + 2/5*2/3) = - 4/19 → arctg
(-11,9°).
On retrouve bien l'azimut mesurée de la voie (~ -12°). Ce ratio
4/19 n'est pas simple, une fois de plus. Notre conclusion sera donc
différente de celle de M. Guy.
Si un réseau et une structure sont superposés, la structure ou
le réseau qui présente une orientation absolue dans un rapport simple
serait antérieur. Dans le cas où une centuriation et une voie possèdent
toutes deux une orientation dans un rapport simple, on ne peut pas
à priori déterminer laquelle est antérieure. Il est nécessaire dans
ce cas, de vérifier que les tronçons rectilignes de cette voie conservent
toujours une orientation simple. Dans le cas contraire, la route
serait plutôt construite en s'appuyant sur la centuriation [56] .
Si donc, la via Domitia s'appuie effectivement sur des points
matériels du cadastre Narbonne B selon le ratio 2/3, elle pourrait
être alors postérieure à ce cadastre. On peut imaginer dans ce cas,
que le géomètre s'est s'appuyé probablement sur les limites
pour tracer cette voie. Cependant, il faut rester très prudent dans
les corrélations entre les structures, comme l'exemple suivant peut
le démontrer.
Cas de la via Domitia et du cadastre Narbonne D.
Ce même tronçon de voie rentrerait en relation 1/1 (diagonale)
avec le cadastre Narbonne D orienté à ~ +32° (N-N-E). En suivant
le même raisonnement, on arrive aux valeurs suivantes :
Narbonne D serait orienté à 3/5 (31,0°) et la via Domitia
à (31,0° - 45°) = -14,0° (-1/4).
Ici, le ratio est simple, ce qui n'est généralement pas le cas
(voir tableau infra). On ne peut donc pas, à priori, distinguer
qui du cadastre ou de la voie est antérieur.
Cependant cette méthode cache un piège. Car, autant il n'existe
qu'un petit nombre de fractions simples pour orienter les cadastres,
disons une quinzaine, autant il peut exister un grand nombre de
ratios non simples dans la superposition des structures. En effet,
l'azimut calculé pour cette voie est de -14,0°, proche de la valeur
mesurée (~ -12°), mais différent du calcul précédent (-11,9° Narbonne
B). C'est soit l'un, soit l'autre. Les deux ratios ¼ et 4/19 sont
proches, mais différents. Il faut donc être très prudent en ajustant
une grille sur une carte. On peut avoir l'impression de coïncidences
entre les structures, mais ce n'est qu'une illusion. C'est la magie
de la combinaison de ratios simples par la tangente
[57] .
En Languedoc, plusieurs cadastres superposés
[58] ont été signalés : Narbonne, Béziers, Nîmes, Uzès,
etc. Ces cadastres s'appuieraient mutuellement l'un sur l'autre.
Les cadastres de l'Uzège.
Plusieurs réseaux ont été mis en évidence en Uzège, dont quatre
ont été particulièrement étudiés par M. Assenat [59] . Ces cadastres sont :
1- le cadastre Sextantio-Ambrussum, orienté à ~ -22,0°/
N, soit un ratio de – 2/5 (-21,8°),
2- le cadastre Uzès A orienté à ~+14,15°, son ratio serait de ¼
(14,04°),
3- le cadastre Uzès C orienté à ~-16,4°, -17°, son ratio serait
de -3/10 (-16,7°),
4- le cadastre Uzès B orienté à ~+28,35° qui n'a pas de ratio simple,
5-Orange-Nîmes orienté à : NG 5°,6 W (-5,6°), de ratio –1/10 (-5,71°).
(fig. 12).
Il existe, par ailleurs, deux voies structurantes qui partent du
cœur de la cité : la D 981 orientée à ~ 118,6° et la D. 979 à ~163,7°.
Elles sont en diagonale (45°) depuis l'actuel boulevard Gambetta.
Corrélations relevées entre voie et cadastres : la départementale
D 981 serait en relation avec ces cadastres dans les rapports suivants
: 6/5, ¼ et 1/1 respectivement.
Toujours selon la même règle, on obtient les orientations de la
D 981 suivantes :
Pour Sextantio-Ambrussum qui rentre dans le rapport 6/5
avec cette voie, une orientation de 28,39° (-21,8° + 50,19°).
Pour le cadastre Uzès A qui rentre dans le rapport ¼, une orientation
exacte de 28,07° (combinaison ¼ et ¼, c'est à dire 14,036° + 14,036°
).
Pour le cadastre Uzès C, une orientation de 28,30° (1/1 et –3/10,
c'est à dire 45°- 16,70°).
Les 3 angles sont très proches : 28,39°, 28,07° et 28,30° pour
une valeur mesurée de ~28,2°. Evidemment, une seule valeur est exacte.
Supposons que la voie ait été construite sur le cadastre C, il donne
un angle le plus proche de la mesure. Inversement, on peut calculer
les rapports de corrélation :
-
1/1 par définition, pour Uzès C
-
15/50, c'est à dire presque ¼, pour Uzès A
-
61/51, c'est à dire presque 6/5, pour Sextantio.
On pourrait donc croire en superposant les grilles Uzés A et Sextantio
sur la D 981 qu'elles rentrent en ¼ et en 6/5, mais ce n'est pas
exactement le cas. Le résultat aurait été équivalent, si on avait
choisi Sextantio ou Uzés A pour cadastre d'origine et non
plus Uzés C.
Dans les corrélations entre réseaux superposés, il est préférable
de retenir le procédé de calcul, qui est plus précis, plutôt que
la méthode du dessin géométrique. Il faut donc rester extrêmement
vigilant dans les articulations graphiques entre cadastres.
Le cadastre C d'Orange [60]
Les auteurs placent le locus gromae de ce cadastre sur la
rive droite de l'Ouvèze, à partir d'une nouvelle lecture des "marbres
d'Orange". Ce cadastre serait donc un autre exemple d'un réseau
parfaitement déterminé, à savoir une localisation de son locus (qui
reste à préciser), un module de 708 m, une orientation NG 5° Est
et une direction des axes majeurs (le decumanus maximus est
orienté vers l'ouest). Le principe d'orientation énoncé ici préciserait
simplement son ratio, soit 1/10 (5,71°)
[61] .
Si deux réseaux superposés présentent de nombreuses coïncidences
matérielles (et non pas seulement graphiques) et si un de ses réseaux
ne possède pas une orientation absolue selon une fraction simple,
mais rentre en rapport avec le second selon un ratio simple, ce
cadastre pourrait s'appuyer sur le premier. Il y aurait donc antériorité.
Cependant, il est nécessaire de rechercher alors qu'elle ligne structurante
a pu servir au second, mais aussi d'expliquer comment conserver
cet azimut sur le terrain.
Exemple :
Les trois premiers cadastres de l'Uzège sont orientés selon le
principe énoncé sur une référence solaire absolue (fig.12), donc
indépendants les uns des autres. Par contre, le cadastre d'Uzès
B est orienté à ~28,35° et ne présente pas de ratio simple. Il est
en relation avec le cadastre d'Uzès C par les départementales D
981 et D 979 qui sont structurantes pour eux. Ces routes sont à
45° (cadastres symétriques par rapport à la diagonale), d'où une
corrélation B/C en 1/1. On peut donc calculer son orientation exacte,
soit 28,30° (45°-16,70°, ratio 7/13).
Ce ratio n'est pas simple et non multiple de 5. Le principe d'orientation
énoncé serait donc contredit. Cette contradiction n'est qu'apparente.
En effet, les deux cadastres d'Uzès C et B sont bien construits
selon une orientation solaire (-3/10), mais le cadastre B est ensuite
tracé selon la diagonale de la groma. Ainsi le géomètre,
qui a voulu différencier ce deuxième réseau, a le choix : soit en
s'appuyant localement sur des limites existants [62] et en visant par la diagonale de sa groma,
soit si ces limites sont inaccessibles reprendre l'orientation
solaire au gnomon et opérer de la même manière (fig. 12). Cette
dernière méthode est évidemment préférable.
Généralement les coïncidences observées entre cadastres ne sont
pas toujours volontaires, elles peuvent résulter de la combinaison
de deux grilles géométriques. Pour ces deux cadastres, il y a bien
volonté de les différencier et il devrait exister au moins un point
commun qui est le datum. Dans ce cas, on dira qu'Uzès B est
probablement postérieur à Uzès C. Cette méthode de chronologie relative
n'est qu'une aide, en aucun cas une méthode de datation absolue.
Ces exemples montrent que pour différencier sur un même territoire
un réseau d'un autre, le géomètre pouvait retenir des variantes
par diagonalisation. On a reporté dans un tableau une telle combinaison.
On a tg (a-b) = (tg a – tg b) / (1 + tg a*tg b), avec tga le ratio d'orientation solaire, et b
la diagonalisation à 45° (tg b= 1/1).
tg(a-b)
|
tg a
|
0/0
|
1/10
|
1/5
|
3/10
|
2/5
|
1/2
|
5/9
|
tg b
|
|
0,000
|
0,100
|
0,200
|
0,300
|
0,400
|
0,500
|
0,556
|
0/1
|
0,000
|
0,000
|
5,711
|
11,310
|
16,699
|
21,801
|
26,565
|
29,055
|
1/1
|
1,000
|
-45,000
|
-39,289
|
-33,690
|
-28,301
|
-23,199
|
-18,435
|
-15,945
|
5/9
|
3/5
|
5/8
|
7/10
|
5/7
|
4/5
|
5/6
|
9/10
|
10/10
|
tg a
|
0,556
|
0,600
|
0,625
|
0,700
|
0,714
|
0,800
|
0,833
|
0,900
|
1,000
|
tg b
|
29,055
|
30,964
|
32,005
|
34,992
|
35,538
|
38,660
|
39,806
|
41,987
|
45,000
|
0/1
|
-15,945
|
-14,036
|
-12,995
|
-10,008
|
-9,462
|
-6,340
|
-5,194
|
-3,013
|
0,000
|
1/1
|
Orientation solaire et diagonalisation
Exemples : une groma orientée à -16,699° (-3/10) sur un axe cardinal
conduit à un cadastre orienté à
-28,301°, selon sa diagonale à 45° (Uzès B). De même, -3/5 et la
diagonale donnent : 14,036° (Uzès A).
Cette méthode "enrichit" les possibilités d'orientation
solaire. Elle pourrait expliquer, au moins en partie, pourquoi M.
Guy trouve d'autres angles d'orientation
hors des pics de récurrence. Dans l'étude des cadastres, la détermination
de leurs orientations avec une grande précision devient indispensable.
En effet, on ne peut plus différencier pour le cadastre Orange-Nîmes,
s'il s'agit d'une orientation solaire directe avec un ratio -1/10
(-5,71°), ou au contraire d'une orientation en 5/6 combinée à une
diagonale (-5,194°). Seule une étude d'ensemble de ces cadastres permettrait
de valider ces ratios.
Selon ce principe, qui reste à valider [67] , cela pourrait
entraîner les conséquences suivantes dans l'étude des cadastres
antiques :
-
Il est indispensable de déterminer son azimut avec la meilleure
précision par rapport au Nord géographique
[68] .
-
Il reste ensuite à vérifier si cette orientation correspond
à une fraction simple, de préférence multiple de 5 [69] ou bien
-
Si cette fraction simple se combine avec une diagonale,
ce qui serait un indice de postériorité dans certains cas.
Toujours selon ce principe, non seulement l'orientation du cadastre
pourrait être déterminée, mais il semble possible aussi de distinguer
ses axes majeurs mais pas leurs directions [70] .
Cette voie stratégique et fortifiée a été construite
dans les années 14 ap. J.-C. par la III Legio Augusta, Lucius
Nonius Asprenas étant son proconsul, puis entretenue et remodelée
jusqu'aux empereurs tétrarques. Elle a pour point de départ les
"castra hiberna" de cette légion, se poursuit vers
Capsa (Gafsa) pour atteindre la mer à Tacape (Gabès).
Elle est signalée partiellement par la Table de Peutinger et par
l'Itinéraire d'Antonin. Le capitaine Donau [71] avait signalé
en 1902 de nombreux nids de milliaires et il avait reconstitué une
partie de son tracé.
Le contexte historique de cette création est assez bien connu
[72] . Par contre, plusieurs aspects géographiques restent
encore ouverts. On a longtemps supposé que les castra hiberna
se situaient à Theveste et il a fallu attendre la proposition de
de Pachtère [73]
en 1916 pour les placer à Ammaedara, malgré le
scepticisme de R. Cagnat. C'est la raison pour laquelle Donau n'avait
pas trouvé trace de cette route au-delà de Thelepte et qu'il avait
prospecté en vain la voie impériale qui menait à Theveste [74] . A sa suite,
Davin [75] a eu la subtile intuition de
rechercher cette voie entre Ammaedara et Thelepte, via le Kanguet-es-Sloughi,
où il signalait plusieurs milliaires impériaux. Il concluait, comme
Donau, que son "tracé entre les Castra hiberna et Gafsa
ne sera déterminé avec certitude que lorsqu'on aura découvert une
ou deux bornes nouvelles au nom du proconsul L. Asprenas".
Cet itinéraire nord reste encore incertain, même si Salama
[76] signale la liaison de Davin dans sa belle carte
des voies romaines. De plus, certains relais signalés dans les Itinéraires
(plus tardifs) sont toujours discutés [77] . Enfin, certains évoquent l'hypothèse que la
voie peut servir de support à la centuriation ou bien que ces travaux
routiers sont antérieurs aux opérations cadastrales [78] .
Au cours des recherches, cette voie d'Asprenas a été suivie et
ses milliaires relevés. En complément aux bornes signalées par Donau,
le milliaire d'Asprenas M.143, non signalé à ce jour [79] a été retrouvé (fig. 14). Il
complète la liste des bornes d'Asprenas citées par Donau ou dans
le CIL, et précise le tracé de la voie (fig. 13)
[80] . A partir des distances en "mille" inscrites
sur ces bornes, il est possible de reconstituer son parcourt (fig.
15) et le comparer aux valeurs indiquées par la Table de Peutinger [81] .
En effet, la distance totale s'évalue en additionnant les chiffres
inscrits au même endroit sur la borne d'Asprenas dont le comptage
commence à partir du camp à ceux du milliaire impérial comptés depuis
Tacape. Donau avait trouvé une distance totale de 183 milles [82] , valeur que nous confirmons.
Les distances entre stations données par la Table sont alors plus
cohérentes que celles de l'Itinéraire d'Antonin. Elles sont aussi
en accord avec les stations de Veresuos et Thasarte
qu'il est convenu de reconnaître respectivement en Bir Mrabot et
El Aoussej (fig. 15). Cependant le relais de Thasarte
[83] ne se trouve pas sur la voie elle-même, comme
le pensait Donau, mais à 6 km plus à l'ouest sur une voie secondaire.
Cette bretelle est-ouest passe par Henchir El Aoussej, se poursuit
vers Henchir Semah sidi Ahmed et Henchir Soltane et ravitaille les
nombreux castella qui verrouillent la longue chaîne de montagne
du Bled Segui. Il ne subsiste pratiquement plus rien des ruines
imposantes d'Henchir el Aoussej signalées encore en 1904 par le
lieutenant Schmidt [84] .
Dans ce cas, Silesua se situerait, selon les distances données
par la Table de Peutinger, à Biar Bou Loufa
[85] . Les "12 puits dont 7 en eau de Biar Bou Loufa"
[86] sont toujours un point d'approvisionnement important
pour les nomades. Ce relais correspondrait au mille148 d'Asprenas [87] (fig. 9). Donau [88] le situait juste après le col, à Henchir Maguel,
tandis que Trousset
[89] hésite à le placer à Biar Bou Loufa.
Dans son étude, Donau avait signalé un fait important
: le mille mesuré par ses officiers topographes valait 1 600 m environ
au lieu des 1 480 m habituels. Salama
[90] rapporte une valeur de 1 625 m en soulignant cette
valeur exceptionnelle conservée durant toute l'occupation romaine.
Cette même anomalie se retrouve sur la voie Tacape-Turris Tamalleli.
A partir des relevés GPS, la valeur moyenne trouvée est de 1 607
m [91] ,
à laquelle il faut lui ajouter sur le terrain la déclivité de la
route estimée ici à 10%, soit un mille arpenté d'environ 1 615 m.
Par ailleurs, le mille "normal" établi à partir des mesures
de la centurie est de 1 468 m. La différence (147 m) est importante,
soit 10% d'écart. Pourquoi une telle différence ?
La via Asprenas n'aurait pas été arpentée par un harpédonapte
agréé, puisque l'écart est important par rapport au pas étalon.
On pourrait admettre que son tracé a été défini (voir infra) sur
la forma comme pour les projets routiers modernes. Hormis
les cités traversées, les stations étaient choisies en fonction
des points d'eau et des distances acceptables entre les relais pour
chevaux (mutationes). Ces distances évaluées d'après la carte
ne tiennent donc pas compte des sinuosités imposées par le relief,
d'où une distance pédestre plus élevée et variable selon les sections.
R. Chevallier [92] traduit ce fait parce que "la
route s'appuie nécessairement sur le cadastre et ses limites, mais
aussi qu'elle est établie avec le souci d'éviter, dès l'origine,
l'éclatement du réseau en centuries".
On a reporté sur la carte du Chareb (fig. 9) les milliaires de
la via Asprenas. Elle est rectiligne [93] sur près de 20
km, depuis Biar Bou Loufa (Silesua) jusqu'aux abords d'El
Hamma (Aquae Tacapitanae). Sa relation avec la centuriation
est évidente. En effet, la borne gromatique B.6b se trouve au milieu
d'un nid de milliaires, dont le milliaire d'Asprenas 153. Elle porte
un décussis, plusieurs cupules et dans un cadre : > L(V)II(I),
elle se situe au point dd 58. Ce lien organique entre voie et cadastre
est fondamental ; les deux structures s'appuient mutuellement l'une
sur l'autre [94] .
La voie a ici un azimut de 131° et rentre dans le rapport simple
δdd / δuk = l /4 avec le cadastre [95] . Selon la loi des tangentes,
son orientation calculée est de tg (a+b) = (5/7 + ¼) : (1- 5/7*1/4)
= 27/23, soit 49,57° (Az = 130,43°), ce qui est conforme à la mesure.
Ce ratio 27/23 n'est pas simple. La voie n'est pas orientée selon
un azimut solaire, elle devrait s'appuyer, selon le principe énoncé,
sur la centuriation. Cette inter-dépendance géométrique mérite d'être
confirmée.
Dans le Bled Segui, le tracé de la voie est trop incertain pour
être corrélé avec le réseau centurié. Par contre, on note que la
voie entre Gafsa et Sidi Aïch (Gemellae) orientée plein sud
s'intègre dans la grille losangique. On a remarqué aussi que certains
tronçons de la voie Aquae-Turris Tamalleni dans la Bahira
sont construits selon des diagonales du carroyage. Ces corrélations
voie-cadastre ont déjà été mises en évidence sur de nombreux cadastres.
La voie d'Asprenas s'appuierait donc sur la centuriation, mais certainement
pas l'inverse [96] . Un tel non-sens [97] conduit inévitablement à un anachronisme fâcheux.
Une telle proposition, s'il fallait la confirmer, ouvrirait d'autres
perspectives à un contexte historique incertain et parfois même
confus [98] .
Cette centuriation a été parfois abusivement attribuée au proconsul
Vibius Marsus
[99] . Selon J.-M. Lassère [100] , la construction de la route
d'Asprenas est une initiative et même une réalisation d'Auguste.
Peut-être, faudra-t-il rechercher l'initiateur de cette centuriation
dès l'installation de la 3e légion à Ammaedara,
après les opérations militaires de Cossus Lentulus contre les Musulames
et les Gétules ?, ou bien retrouver la présence du grand géomètre
P. Cornelius Dolabella dans cette partie d'Afrique avant sa victoire
sur Tacfarinas ? Il appartient, en tout état de cause, aux historiens
d'établir une chronologie qui soit cohérente entre ces grands travaux
et les replacer dans leur contexte historique
[101] .
En effet, les bornes de Vibius Marsus sont très éloignées de l'origine
d'arpentage. Elles sont aussi d'une facture nettement différente
des bornes plus septentrionales du Bled Segui [102] . Or, on sait
que ces opérations ont été exécutées sur un terrain difficile encore
peu connu des Romains, dans un contexte de troubles. Elles sont
longues et délicates et il a fallu arpenter des milliers de kilomètres
carrés avant d'arriver à la mer. Ces opérations se sont nécessairement
étalées dans le temps. A notre avis, les premières triangulations
auraient débutées avant les travaux routiers de L. Asprenas [103] , sans doute selon un cheminement
proche de cette voie stratégique dont la construction s'appuiera
sur ces limites "géodésiques". Ce réseau triangulé
originel servira d'épine dorsale
[104] de la centuriation, sur laquelle viendront se
greffer des ramifications au fur et à mesure de la colonisation.
Cette triangulation de premier ordre sera ensuite complétée par
Vibius Marsus qui cadastrera la région des chotts, puis par le géomètre
de Trajan pour tracer la frontière. A ne pas en douter, ces derniers
ont du s'appuyer sur la forma initiale et les bornes géodésiques
déjà en place.
Les géographes de l'Antiquité n'opéraient pas autrement : la carte
d'Erathostène est construite à partir du méridien d'Alexandrie et
du parallèle de Rhodes [105] . La carte de France sera réalisée à partir d'une
triangulation de la méridienne de Paris, sur laquelle viendra se
greffer d'autres triangulations, le parallèle des Pyrénées, [106] en 1825-1827 par exemple. Ces opérations géodésiques,
jugées encore inattaquables, et les travaux cartographiques qui
suivirent se sont montraient indispensables aux opérations militaires [107] . Les travaux des centurions-
triangulateurs relèvent probablement de la même intention.
L'extension de cette forma est connue aujourd'hui jusqu'au
nord de la petite Syrte (borne de Graïba), mais rien ne s'oppose
à ce qu'elle ait été poursuivie dans d'autres territoires. Le bornage
du territoire des Musulames par Trajan découle probablement de la
même volonté que le bornage des Nybgenii. Le comput [108] de la borne de L. Minicius Natalis au pied de
la Table de Jugurtha (voir annexe) laisserait à penser qu'elle pourrait
être rattachée à cette centuriation. La suggestion de Barthel d'un
"grand cadastre" est tout à fait recevable, même si celui-ci
ne couvre pas la totalité de la Proconsulaire. En effet, rien n'interdit
que d'autres centuriations de Tunisie viennent s'intégrer dans une
"grande forma", même si leurs orientations sont
différentes [109] . Il suffit
d'une opération de raccordement entre des centuriations construites
indépendamment [110] pour les assembler dans une
seule et même carte. Une carte murale de l'Italie existait bien
dans le temple de la Terre et une mappemonde, gravée sur pierre
était exposée sous un portique de Rome [111] . De même,
l'hypothèse de Barthel [112] , que cette forma aurait
pu servir de source à la carte de Ptolémée, est encore tout à fait
acceptable. Une mauvaise prise en compte de son orientation [113] pourrait expliquer
pourquoi certaines cartes antiques représentent une Tunisie si couchée [114] , alors que ses grandes lignes (côtes et fleuves)
sont bien précisées. Strabon
[115] ne s'est-il pas trompé en donnant à Carthage
une latitude de 32,5° (ratio 11/7) alors que celle-ci est de 36°51'
?
Le paradoxe d'A. Piganiol [116] d'une centuriation
dont aucune trace ne peut être déceler sur les clichés aériens,
ou celui de P. Trousset [117] d'une limitatio
dont la finalité risque d'apparaître moins évidente que les prouesses
techniques semble s'éclaircir. Cette grande centuriation a probablement
engendrée une carte d'état-major qui se révèlera un outil d'aménagement
et une arme de guerre redoutable. Barthel l'avait pressenti. Son
œuvre, ainsi que celui des officiers topographes qui ont arpenté
le terrain, méritent d'être mieux reconnus.
Les bornes de la décumane
65.
(Extraits du catalogue version
du 3 avril 2001)
Borne B.30. Douar Safi. (Carreau IR. Feuille Bir
Rekeb LXXIII .1/100K. Bled Segui).
Découvreur : Asc/Cnes-Amcks (2000).
A 3,3 km à l'E-N-E du douar Safi, non loin d'un milliaire, sur
renseignements d'un habitant du douar, la partie supérieure d'une
borne en parfait état a été retrouvée en bordure d'un champ. Elle
venait d'être enlevée d'un ancien puits condamné.
Bloc en calcaire dur de couleur ocre, de même facture que la borne
de Bir Oum Ali (B.20). Dimensions : hauteur 37 à 40 cm, section
36*25 cm ; poids ~ 70 kg. Sur la face avant, en belle épigraphie
deux lignes : DD LXV (1ére) ; VK CCV (2éme), hauteur des lettres
6 cm. Sur la tranche supérieure, un décussis (+) bien marqué avec
une cupule centrale (Φ 7) et une plus petite décentrée.
Position relevée sur le terrain N 34° 09,845' ; E 9° 27,462' (WGS
84)
Position théorique N 34° 08,810' ; E 9° 26,952'. Elle a été déplacée
d'environ 2 km pour la construction du puits.
Coordonnées romaines : DD 65, VK 255 (paramètres p = 30 1/8, q=
20 7/8 dans la grille losangique 5/7)
Borne B.7. (CIL
VIII 22786 E). J. es Stah. (Carreau JS1. Feuille El Hamma
LXXIV. 1/100K. Chareb).
Découvreur : Cap. Donau (~1906).
Cette borne a été retrouvée au pied sud du Jebel es
Stah, en aval d'un ravin descendant directement de cette montagne.
Borne en place mais renversée, cassée en deux parties qui s'emboîtent
aisément, en calcaire grossier de couleur beige. Dimensions : 72*28*24
cm. Poids ~100 kg.
Sur la face frontale, deux lignes de texte : VK CCL XX (hauteur
des lettres 5,5 cm) ; NYBG (hauteur 7,5 cm). Le L est arrondi et
le G a une barre oblique prononcée (
).
Sur une face latérale (à gauche en regardant la face frontale)
: une ligne de texte : DD LXV, hauteur des caractères 4,5 cm. Sur
la tranche supérieure remarquable par ses nombreux trous et un décussis
: le trait selon la plus grande dimension (28 cm) est bien marqué
; l'autre perpendiculaire est à peine esquissé. Présence d'un trou
central décalé et de 4 à 6 cupules et/ou trous d'érosion (estampage).
Position mesurée : N 34° 04,123' ; E 09° 30,877' ; Z ~90 m.
Coordonnées romaines : DD 65 ; UK 270. Paramètres losangiques :
p= 31 5/8, q= 22 3/8.
Remarque : de nombreuses traces d'habitations (poteries berbères)
et de nécropoles sont visibles sur ce versant sud du jebel es Stah.
Borne B.28. Oued Chenah. (Carreau JS6. Feuille El Hamma LXXIV. 1/100K.
Chareb).
Découvreur : Asc/Cnes- Amcks (1998)
A 3,8 km à l'ouest de Biar Bou Loufa, et à ~1.650 m au S.S.E de
la borne 7, dans une habitation abandonnée, une borne encastrée
dans l'embrasure de la porte d'entrée et servant de seuil a été
trouvée.
Pierre calcaire de couleur paille grossièrement équarrie.
Dimensions : 63*19 à 23*16 à 23 cm ; poids : ~ 50kg.
Sur la face frontale (19*23), dans la partie supérieure,
l'inscription suivante : > II ; hauteur du signe > 11cm, hauteur
des chiffres 6 cm. Sur la tranche supérieure, un décussis (+) et
une cupule centrale.
Position mesurée : N 34° 03',340 ; E 09°31',372 .
Coordonnées romaines calculées : DD 65 ; VK 272. Paramètres :
p = 31 7/8, q = 22 5/8. Elle aurait été déplacée d'une centaine
de mètres pour l'emploi dans la construction.
Borne B. 27. Ennfidet el Ara. (Carreau JS5. Feuille
El Hamma LXXIV. 1/100K. Chareb).
Découvreur : Asc/Cnes- Amcks (2000).
Dans une zone vallonnée, exactement entre les bornes
7 et 26, une borne de la décumane 65 a été relevée à une dizaine
de mètres du point calculé.
Borne cassée en deux parties facilement raccordables,
constituée d'une tranche calcaire jaunâtre finement feuilletée (pas
de fossiles ou de minéraux particuliers), cette roche foliée se
désagrège par lames. Dimensions : 87 * 36 * 15 cm ; poids ~ 90 kg.
Sur une face, l'emplacement du cadre est écaillé et toute la partie
arrière a disparue. L'épaisseur initiale de la borne est estimée
à 18-20 cm. Sur la tranche supérieure, un décussis (+) avec une
cupule centrale et une autre cupule excentrée (Ф 4 cm).
Position mesurée : N 34° 02,586' ; E 9° 32,249'
Coordonnées calculées : DD 65 ; VK 275. Paramètres
losangiques : p = 32 1/8, q = 22 7/8. La borne est bien sur la décumane
65 et sur le même cardo (uk 275) que la borne B.9.
Borne
B.26. Ennfidet el Ara. (CIL VIII 22788). (Carreau JS4.
Feuille El Hamma LXXIV. 1/100K. Chareb).
Découvreur : Cap. Donau (~1907)
Selon Barthel [118] , qui compare les deux textes
du CIL 22788 et du CIL 22787 : " Il est évident qu'il s'agit
de deux bornes entre les Nybgenii et le territoire de Tacape
: sur le I (CIL 22787) les deux noms sur deux côtés opposés , en
plus sur une des deux bornes en haut la remarque term(inus) inte(r)
tac(apitanos) et Nybg(enios), de même sur le II (CIL
22788), les noms sont bien répartis sur la base du côté ouest et
est, sur le 4e côté de la pierre est même écrit (in)ter
Tac[et Nybg]. Sur les deux, nous pouvons lire le nom de Trajan
dont on trouve aussi des traces dans la 1e ligne du côté
droit. La fin de l'inscription est soigneusement faite (sec)
undum formam missam sibi eo posu(it)
[119] . L'expression mentionne le mensor,
mais ceci n'est plus reconnaissable. La pierre I offre encore une
remarque étrange dans laquelle le mensor veut expliquer pourquoi
il a placé deux termini à cet endroit." Toujours selon
Barthel, cette borne serait à 300 m environ du point dd 65 uk 280.
Cette pierre a été retrouvée
[120] (2000) à 3 km à l'ouest d'Henchir Chenah dans
un petit cirque plat. Il s'agit en fait de 3 blocs taillés et gravés
en calcaire ocre. Deux autre blocs taillés sont aussi visibles cinquante
mètres plus au sud, mais sans inscription. La seconde borne signalée
par Donau et rapportée par Barthel (CIL 22787) n'a pas été retrouvée.
Il y a sans doute confusion sur la localisation de cette dernière.
Description : 1er bloc 26A
Dimensions : bloc parallélépipédique à section carrée 50,5 * 51,5
* 45 cm dont un angle inférieur cassé (poids 230 Kg). Sur 2 faces
opposées, les inscriptions suivantes :
Face A (Est): TAC (hauteur lettres 8,5 cm),
Face C (Ouest): N(?)YBG (hauteur lettres 5,5 cm).
Sur la tranche supérieur un décussis particulier : deux lignes
à angle droit dont une se termine par une flèche
( ) longueur 51 cm, hauteur 13 cm. Un V est gravé sur
la ligne côté flèche (hauteur 7cm), et un trait oblique de l'autre
(fig. 11). On retrouverait le V (Kardo?) du décussis de la "borne
gracchienne" de Atena Lucana ( CIL I², 639), et la flèche du
cippe gromatique du Museo della Civiltà romana.
La borne a été probablement déplacée. On pourrait admettre que
les inscriptions faisaient faces aux territoires correspondants.
La flèche du décussis est orientée vers la face NYBG, c'est à dire
vers l'ouest.
2éme bloc 26B
Dimensions : bloc à section carrée, bosselé sur la face supérieure,
plat sur la face inférieure: 51* 51* 40 cm (poids 200 kg). Sur les
faces latérales, une inscription décrite en des termes presque identiques
par Barthel et dans le CIL 22788. Les termes suivants ont été lus
ou déchiffrés :
Face A (gauche) : //////CM(?)V(?)// │ ER III // COS //
│ ///// V(?) D(?) //
Face B (avant) : EX.AVCTOR │ // VAE(?)////(trou)// │
// F(?)ORMAMISSA/
Face C ( droite) : /// I(?) ANX(?)/A(?)///│ /P I(?) /////
│ SIB(?)IABEOPOSU(?)//
Face D (arrière) : S(?) INTER
.TAC .
Sur la tranche bosselée, plusieurs cupules : une centrale (Ф
4cm) plus six autres plus petites.
3ème bloc 26C
Plus mince, à section carré : 51 *50,5 *19 cm (poids ~100 kg).
Sur une tranche dont un angle est brisé des trous incertains.
Remarques : les 3 blocs de même section sont superposables. Ils
font partie d'une même stèle.
Apport possible de cette nouvelle lecture : on retrouverait sur
la face B le nom de (Ner)VA(E) comme le suggère Barthel au
rapprochement des deux épigraphies. Sur la face A, on a pu déchiffrer
quelques lettres complémentaires. La disposition de l'épigraphie
n'est pas identique à celle rapportée dans le CIL.
Barthel avait comparé ces deux bornes aux bornes de
délimitation des Musulamii: "un tel bornage côte à côte
de deux inscriptions frontalières se trouve au marquage des frontières
entre les Musulamii (Musulames) et des Madauros (Madaures)
et de citer le légat L. Minicius Natalis. Pour permettre la comparaison,
l'inscription de ce légat, relevée sur la borne de Rebiba (Kalaat
Senam), est rapportée ici :
(1e.) EX AVCTORITATE ║ IMP. NERVAE. TRAIANI. CAESARIS
║ AVGVSTI GERMANICI DACICI. PONTIF. ║ MAXIMI. TRIB.
POTEST.V(I)III. IMP. IIII. COS. V. P.P. ║(5e.)
L. MINICIVS. NATALIS. LEG.AVG. PR. PR. INTER. MV ║
SVLAMOS. ET. VALERIAM. ATTICILL( )AM ¤ [121] .
Sur la dernière ligne (7e.) : LXXXX A.P.P. CXVICD
(la barre est en haut).
Position mesurée : N 34°01, 022' ; E 9°33, 574'.
Coordonnées romaines calculées : DD 65 ;
UK 280. Paramètres losangiques : p = 32 5/8, q = 23 3/8. Cette
borne est bien sur la décumane 65 et forme un angle droit avec les
bornes B.1 et B.14 de Vibius Marsus et avec la borne B7 de Trajan.
Cette borne est manifestement gromatique, le numéro 26 lui a été
attribué.
Borne
B.14. Ben Rhilouf. (CIL VIII 22786K). (Carreau KU. Feuille
El Hamma LXXIV. 1/100K. Bahira).
Découvreur : (Lieut. Schmitt [122] , 1904 et cap. Donau). Cette
borne a été stationnée par Davin en 1930.
Elle a été retrouvée près de la route conduisant à une petite palmeraie,
non loin d'anciennes carrières d'où la borne pourrait provenir.
Tronçon de borne en pierre rougeâtre, visiblement non à sa place.
Dimensions : hauteur 73 et 38 cm, section 44*35 cm ; poids ~ 140
kg.
Sur la face avant, un texte très endommagé dans un cadre de 34
cm :
LEG III AUG / ..EIMI. / .. / OC (?) ../ ... (hauteur des lettres
environ 4 cm) (estampage).
Sur la tranche supérieure, un double decussis avec deux
traits parallèles (35 cm) équidistants de 5 cm. Perpendiculairement
à ce double trait, deux autres traits parallèles, équidistants de
10,5 cm, de longueurs 11 et 30 cm. Les largeurs des traits parallèles
sont dans un rapport 2. Dans le rectangle central, une cupule légèrement
excentrée (Φ 5,2).
Le deuxième morceau de la borne qui avait été signalée n'a pas
été retrouvé.
Position mesurée : N 33° 53,196' ; E 9° 40,407'. Localisation cohérente
avec les mesures de Davin, la borne n'est manifestement pas à sa
place.
Coordonnées romaines calculées : DD 65 ; UK 305. Paramètres losangiques
: p= 35 1/8 ; q= 25 7/8.
Remarque : cette borne est bien sur la décumane 65. Barthel qui
n'en connaissait pas ses coordonnées ne l'avait pas placée sur ce
limes.
Borne B.? . J.
Terhendourt. CIL 38 et complément 11051. (Carreau MW. Feuilles
Oglat Merteba 1/100 k).
Découvreur : Chevarrier.
Localisation: "A environ 50 km au S-E des 2 bornes (CIL 22787
et 22788, d’Ennfidet el Ara), sur le sommet du jebel Terenhdourt
(263 m)" [123] . "..à 35 km 0-S-0 de
Gabès, près de la zaouïa de Sidi Guenaou » (CIL 11049).
Description : "Un quart de borne sur laquelle est écrit: ..TER../
.INYBRAVI./.."(Chevarrier). Toutain et Barthel pensaient que
ce fragment était une borne de délimitation du territoire des Nybgenii
et de Tacape. Barthel estime que le dj. Terhendourt correspond au
point dd 65 et vk 350.
Recherches : Borne non recherchée, son numéro d'ordre n'a pas été
attribué.
Position géographique théorique : N 33° 39’,126 ; E 9°52’,153.
Coordonnées estimées selon le modèle : DD 65, VK 350 (en accord
avec Barthel), paramètres losangiques : p= 39 5/8 ; q= 30 3/8. Cette
cippe serait une borne de délimitation sur la décumane 65.
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Toutain J. 1903. Les nouveaux milliaires de la route de Capsa
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de la SNAF, t. 4, p. 153-230
Toutain J. 1907. Le cadastre de l'Afrique romaine. Etude sur
plusieurs inscriptions recueillis par le capitaine Donau dans la
Tunisie méridionale. Mémoires des Antiquaires de France,1905,
n° 64, p. 227-235 et Mémoires. de l'Acad. des In. & B. -L.,
t. 12, p. 341-382.
Toutain J. 1910. Le cadastre de l'Afrique romaine. Mémoires
de la S.A.F., t.10, p. 79-103 et Note d'épigraphie et d'archéologie
tunisienne. 1907, B.C.T.H.S, p. 354-359.
Trousset P. 1978. Les bornes du Bled Segui. Nouveaux aperçus
sur la centuriation du Sud tunisien. Ant. Afr., t.12, p. 125-177.
Trousset P. 1981. L'idée de frontière au Sahara et les données
archéologiques. CRESM, p. 47-73.
Trousset P. 1995. Un nouveau document sur la limitatio de C.
Vibius Marsus. Roman Frontier, Exeter, Oxbow Monograph, p. 3-11.
Trousset P. 1999. Territoires de tribus et frontière au sud
de l'Africa Proconsularis. IIe. colloque sur les Hautes Steppes.
Sbeïtla, p. 59-68.
Trousset P.1999. Les centuriations de Tunisie et l'orientation
solaire. Ant. Afr., t. 33, p. 95-106.
1 - Carte de la grande centuriation tunisienne
2 - Carte des bornes gromatiques tunisiennes
3 - Descriptif des bornes
4 - Borne inédite B.30. On lit : DD LXV / VK CCLV et un decussis
sur la tranche.
5 - Réseau centurié du chott el Fejej et ses bornes;
6 - Borne B.26 de Nerva Trajan.
7 - Forma et la grille losangique 7/10.
8 - Les bornes du Bled Segui et sa grille losangique 5/7.
9- Carte des bornes du Chareb.
10 - Cadastres de Carthage et ses axes majeurs.
11 - Décussis de la borne B.26.
12 - Orientation des cadastres de l'Uzège.
13 - Carte de la via Asprenas. (R. Hilton)
14 - Un milliaire inédit d'Asprenas.
15- Via Asprenas selon les Itinéraires et selon Donau.
1
- Carte de la grande centuriation tunisienne
2 - Carte des bornes gromatiques tunisiennes
3 - Descriptif des bornes
Disponible en téléchargement
4 - Borne inédite B.30. On lit : DD LXV / VK CCLV et un decussis
sur la tranche.
5 - Réseau centurié du Chott el Fejej et ses bornes
6 - Borne B.26 de Nerva Trajan.
7 - Forma et la grille losangique 7/10
8 - Les bornes du Bled Segui et sa grille losangique 5/7
9- Carte des bornes du Chareb.
10 - Cadastres de Carthage et ses axes majeurs.
11 - Décussis de la borne B.26.
12 - Orientation des cadastres de l'Uzège.
13 - Carte de la via Asprenas. (R. Hilton)
14 - Un milliaire inédit d'Asprenas.
15- Via Asprenas selon les Itinéraires et selon Donau.
Disponible en téléchargement
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Lionel R. Decramer. Section archéologique ASC/CNES. CNES.
18 av. Edouard Belin. 31401 Toulouse Cedex 4. E-mail : lionel.decramer
@cnes.fr
** Richard Hilton. Section archéologique ASC/ IGN. IGN/Espace.
Parc technologique du canal. 31527 Ramonville St Agne Cedex. E-mail : richard.hilton@ign.fr
***
Alain Plas. Section archéologique ASC/CNES. MMI. Espace entreprise
B.13, av. Charles De Gaulle. 31138 Balma Cedex.
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